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Venance Payot, un donateur

Accéder à la galerie d'images Une des préoccupations des collectionneurs du XIXe siècle était le devenir de leurs collections ; deux possibilités s’ouvraient à eux : soit créer un lieu pour présenter leurs collections, soit les offrir à une institution déjà existante, musée ou bibliothèque.
Alors qu’il atteint l’âge de 70 ans, Venance Payot se soucie de trouver un lieu pour abriter ses collections après sa disparition, et c’est vers le musée le plus important du département de Haute-Savoie qu’il se tourne, celui d’Annecy.
Installé avec la bibliothèque municipale dans l’Hôtel de Ville d’Annecy Voir les images se rapportant à ce passage, le musée présente des collections d’histoire naturelle (botanique, zoologie, minéralogie) s’intéressant particulièrement à la région de Savoie. Plusieurs des conservateurs du Musée furent des scientifiques, parfois éminents, tel Gabriel de Mortillet. Venance Payot a donc des liens avec Annecy, à travers l’Académie florimontane et ses relations avec plusieurs de ses membres, notamment Marc Le Roux Voir les images se rapportant à ce passage, conservateur du Musée et de la Bibliothèque d’Annecy, lui-même de formation scientifique.
Le 15 février 1897, Payot adresse un courrier au Maire d’Annecy pour lui faire part de son désir d’offrir ses collections à la Ville. Mais il y met quelques conditions :
« je veux que ces collections restes [sic] séparées du Musée actuel sans jamais être confondues dans celui existant dans une pièce voisine ou contigue de celui existant et portant le nom de Musée Venance Payot naturaliste de Chamonix à l’entrée afin qu’on soit édifié… » Voir les images se rapportant à ce passage

Suit un descriptif des collections qu’il envisage de donner : une collection de coléoptères et de lépidoptères des environs du Mont-Blanc, une collection d’œufs d’oiseaux de la Savoie, une collection de roches des terrains cristallins et sédimentaires, une collection de fossiles, un groupe de gros cristaux blancs et noirs Voir les images se rapportant à ce passage trouvés dans une grotte sous la Mer de Glace, un bouquetin Voir les images se rapportant à ce passage, les herbiers de phanérogames, de cryptogames, de mousses et enfin, sa bibliothèque. Les objets seront accompagnés d’un petit capital dont les intérêts « serviraient à perpétuité à l’entretien de ces collections ». A la différence des collections que Payot entend donner de son vivant – pour contrôler la manière dont elles seront installées – le capital sera donné en legs.
Consulté par le Maire, Marc Le Roux conseille d’accepter « avec empressement la proposition Payot ».
A partir du mois d’avril 1897, Payot commence à envoyer des spécimens pour le Musée d’Annecy ; Marc Le Roux accuse réception de 11 caisses le 27 avril 1897, mais il note que le bouquetin a le cou tordu Voir les images se rapportant à ce passage et que les boîtes d’insectes sont couvertes de poussières de mites !
Les envois vont s’étaler sur plusieurs années ; Payot recherche des solutions économiques : Voir les images se rapportant à ce passage
« Comme je vous l’ai annoncé que j’attendais l’occasion d’un voiturier de la Roche pour lui remettre toutes les caisses qui sont toutes prêtes depuis le moment que je vous l’ai annoncé. C’est en évitation [sic] de frais que je désirai profiter de cette occasion… » (8 avril 1897).

Mais les conditions climatiques retardent ses projets :
« La caisse de minéraux est encore ici elle attend toujours l’occasion de parvenir à Cluses quant au passage assez redoutable des Montets il paraît enfin qu’il est ouvert aux voitures grâce à de nombreuses équipes. Malheureusement nous avons un temps déplorable d’hiver… » (10 mai 1897).

Certains objets réclament des précautions particulières :
« Ma collection d’œufs est enfin emballée dans 3 caisses mais je n’oserai les confier au chemin de fer de la manière qu’on traite les colis même fragiles j’attendrai une occasion d’une personne pouvant en prendre soin… » Voir les images se rapportant à ce passage (19 mars 1899).

En 1898, les rapports entre Venance Payot et Annecy virent à l’aigre ; l’installation de ses collections au Musée, dans les conditions qu’il impose, semble traîner. Plusieurs courriers de Payot réclament avec insistance des précisions sur cette installation :
« Il y a environ 3 mois que j’ai eu l’honneur de vous demander quelques indications sur le degré d’avancement de cette installation mais je n’ai pas eu l’avantage d’en avoir de réponse » (3 mars 1898) .
« Quoique je n’ai pas été favorisé d’une réponse à ma dernière lettre… »
(18 octobre 1898).

Payot ne cesse de rappeler ses conditions et menace de reprendre les objets qu’il a déjà envoyés. Louis Boch, maire d’Annecy, et Marc Le Roux lui adressent des courriers conciliants. Le Roux, dans un courrier du 10 janvier 1900 dessine un croquis de l’installation qu’il lui a réservée, et en vante les avantages Voir les images se rapportant à ce passage.
Payot finit par se déplacer jusqu’à Annecy pour constater l’état de présentation de ses collections : il n’en est pas très satisfait :
« quand j’apportais dernièrement ma collection d’exsiccata afin de voir la pièce que Monsieur Le Roux m’avait destiné [sic] et que je trouvais trop petite d’abord que les objets, les uns trop hauts, les autres trop bas que je lui demandais s’il ne pouvait pas me destiné [sic] une autre pièce plus grande, il me répondit que cela ne se pouvait pas … » (18 novembre 1900).

Finalement Payot se résigne et reprend les envois de caisses d’objets et de livres, jusqu’à sa mort qui intervient le 13 mars 1902.
Le 27 mars 1902, Marc Le Roux atteste que les conditions fixées par Venance Payot sont absolument respectées et qu’il est possible d’accepter le legs, consistant en « …une somme de 2 000 francs qui devront être placés nominativement en fonds français à 3%… » Voir les images se rapportant à ce passage
Dans les années qui suivirent, les intérêts de cette rente furent utilisés pour l’achat de livres scientifiques qui prenaient place à la suite de la propre bibliothèque de Venance Payot, mais à la fin de la Première Guerre Mondiale, la valeur de la rente fut réduite à néant Voir les images se rapportant à ce passage.
La bibliothèque et le musée d’Annecy conservent encore dans leurs collections les dons de Venance Payot, mais aujourd’hui rangés dans des magasins et réserves Voir les images se rapportant à ce passage.