Promenade en Rhône-Alpes à la fin du XIXe siècle : Des paysages contrastés Nouvelle fenêtre : site de Lectura
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Promenade en Rhône-Alpes à la fin du XIXe siècle : des paysages contrastés

Introduction

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Au début du XIXe siècle, le «  grand tour » continue d’entraîner, toujours, les jeunes Britanniques bien nés à la découverte du reste de l’Europe, méridionale surtout ; mais ils croisent sur ces chemins ceux du reste de l’Europe. Et surtout leurs chemins se croisent, dès la fin de l’Ancien Régime, auprès de ces lieux de sociabilité de plus en plus établis que sont les stations thermales où l’on fait aussi jeu d’argent : une nouvelle géographie urbaine se met en place, où l’on ne fait que passer, en marge évidemment des habitants, et de nouveaux centres citadins naissent à la foule dans les Alpes : Allevard, Uriage, Chamonix, etc. – tandis que les villes existantes se gonflent à leur périphérie et que l’industrialisation gagne.
S’impose aussi l’attrait des sites naturels extravagants – en particulier dans les montagnes de la Savoie, française à partir de 1860 ; voyez Chamonix et sa Mer de glace qui, à la fin du XIXe siècle, a quelque chose d’une attraction foraine. On ne peut pas ne pas adhérer à l’effroi et à l’admiration de Monsieur Perrichon face à ce site exceptionnel, à l’accès d’ordinaire réservé à quelques élus, devenu divertissement partagé – et ne pas en faire une lecture sociologique plus complexe.

Car l’émotion naît, en même temps, à la lecture, plus ou moins maîtrisée, plus ou moins consciente, d’un spectacle qui n’est pas le même pour tout le monde. La preuve n’en est-elle pas dans la lecture individuelle que chacun peut en faire, et dans l’incessant renouvellement de la lecture qui en sort ? Au fond, nous ressemblons à Parménide, pour lequel chaque jour était différent le soleil qui naissait.
Du coup, il n’y a pas de hiérarchie esthétique, chaque objet est à découvrir – et voilà donc cette terrasse de Valence, l’organisation de Roanne et, peu à peu, l’effacement des traces de la première industrialisation à Saint-Étienne (en attendant ce qui deviendra l’archéologie industrielle).

Le regard glisse peu à peu du monumental à l’ordinaire, dans le mouvement d’une sensibilité de moins en moins élitiste – avec, en toile de fond, toujours cette recherche de l’« artistique », pour le meilleur ou pour le pire, lorsque la science se pare de couleurs dans le cas de la pomologie bressane ou lorsqu’un président de la République se fait le plus ardent thuriféraire de l’aménagement d’un parc valentinois. On assiste à l’émergence du pittoresque, qui naît en dehors du bon goût et fait appel à d’autres critères esthétiques plus ou moins formalisés. Voici donc d’autres objets à considérer, d’autres monuments à visiter, qui se chargent désormais d’un sens qu’ils n’avaient pas parce que réduits à l’usage et à l’utilité. Voilà que le regard change, et que circulent les cartes postales des vues pittoresques de Lyon. Ce siècle du savoir et de la pédagogie fut aussi celui de l’éclectisme. En témoigne ici l’apparition de la figure du touriste, petit-bourgeois déjà, qui incarne l’accession à une culture élémentaire qui peut susciter tout autant le ridicule que l’admiration. Grandiose et banalité, érudition et divertissement, conquête de la modernité et nostalgie d’un passé réinventé, paysages sauvages et nature domestiquée : tout est là dans le joyeux désordre d’une époque agitée.

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