L'aube de Cheyne
Lorsqu’on commence à s’intéresser aux éditions Cheyne, on a très vite envie de tout savoir. Tout lire. Tout savourer. Depuis 1980, cette maison d’édition indépendante conçoit, imprime, publie et fait vivre la poésie contemporaine depuis les plaines du Massif central. Au fil des ouvrages, des rencontres, des Lectures sous l’arbre (nouvel onglet), la famille s’agrandit. En 2017, le duo Elsa Pallot et Benoît Reiss a remplacé le couple fondateur composé de Jean-Marc Manier et Martine Melinette.
Dates historiques
- 1980, sortie des trois premiers livres de l’Imprimerie de Cheyne, dont Pendant que les autres ne sont pas moi d’André Brun.
- 1990, 10 ans seulement après la création de Cheyne, la BNF (Bibliothèque Nationale de France) à Paris lui consacre une rétrospective. La même année, le nom de la maison Cheyne change pour Cheyne Éditeur.
- 1992, création du festival "Les lectures sous l’arbre". En 2020, Cheyne fête la 29e édition.
- 1998, première édition de Matin brun de Franck Pavloff. Cette nouvelle est le plus grand succès de Cheyne avec près de 2 millions de livres vendus à ce jour. À l’occasion des 40 ans, une édition spéciale du livre est imprimée, sous forme d’un journal parodique : Les Nouvelles Brunes.
- 2008, Cheyne obtient le label Entreprise du Patrimoine Vivant du ministère du Commerce et de l’Artisanat.
- 2017, Jean-François Manier passe la main à deux de ses salariés, Elsa Pallot et Benoît Reiss. Les fondements à l’origine du succès de Cheyne sont conservés, tout en inventant de nouveaux chemins. Un nouveau logo de la maison est créé pour la reprise.
De la rencontre à l'impression
Dans son exposition virtuelle (nouvel onglet), la bibliothèque de la Part-Dieu à Lyon retrace les différentes étapes de la vie du livre, de la création à la diffusion, en passant par la fabrication. En premier lieu, les éditeurs et éditrices trient les textes reçus et soumettent ceux de leur choix aux directeurs de la collection qui leur sied le mieux. S'ensuivent des débats, discussions sur la poésie que les éditeurs souhaitent offrir au public.
"Si le texte ne convainc pas chacun des lecteurs, il n’est pas retenu. Si tous les avis sont positifs, le livre sera publié dans la collection qui a été pressentie.
Lors de ces échanges, tout est pris en compte : la qualité du texte bien sûr, l’originalité du projet d’écriture, mais aussi l’équilibre du catalogue (par exemple : un nouveau manuscrit convaincant, mais dont le thème se rapproche trop de celui d’un ou de plusieurs livres publiés il y a peu). Il n’y a pas de réécriture à Cheyne, seulement des suggestions et des remarques ouvertes. L’auteur a toujours le dernier mot."
Graphisme et typographie
Un des
maillons de l'indépendance de Cheyne repose sur le fait que les ouvrages
sont imprimés sur place, au plomb à l'ancienne. Le rapport au papier,
au livre en tant qu'objet est maintenu
par cette proximité avec la matière, l'encre qui permet à Cheyne d'avoir
une grande liberté et un grand contrôle sur son catalogue.Lenteur et politique
Éloge de la lenteur, manifeste de Jean-François Manier
Face au risque de n’avoir plus à déguster, dans un avenir proche, qu’une littérature “fast-food”, il me paraît urgent de résister aux pouvoirs grandissants des gestionnaires de la culture.
Le livre est un tel enjeu qu’il exige d’autres critères de valeur que sa seule vitesse de rotation. Et je crois même que son irremplaçable richesse tient à ses lenteurs, à ses pesanteurs. Ce sont ces contraintes qui font du livre une liberté qui dure.
Oui, il faut un autre temps pour le livre : un temps pour l’écrivain face à son œuvre, pour l’artisan face aux papiers, aux encres, un temps aussi pour le bibliothécaire en ses choix, le libraire en son commerce, comme pour le lecteur en son plaisir.
Le temps, sans doute, que mûrissent les rencontres, que s’accomplissent les imprévisibles métamorphoses. Le temps du lent émerveillement. Celui de l’urgence d’aimer.
JEAN-FRANCOIS MANIER
Éditeur-typographe