Retour sur les œuvres de l'architecte lyonnais, à l'occasion d'une exposition de photographies d'Anne-Sophie Clémençon à la bibliothèque de la Part-Dieu de Lyon (espace Patrimoine) du mercredi 15 juillet 2020 au samedi 2 janvier 2021.
L'exposition commence par nous présenter l'importance de l’œuvre de Tony Garnier ainsi que l'histoire de l'architecture dans la relation que nous entretenons avec le patrimoine bâti.
Face à la crise écologique majeure à laquelle nous sommes confrontés, la
question de notre rapport au patrimoine construit est essentielle et
fait partie des solutions. Dans la perspective de limiter l’utilisation
des ressources, ménager plutôt qu’aménager est une posture à développer.
Le patrimoine qui nous a été légué par l’architecte urbaniste Tony
Garnier (1869 - 1948) fait partie intégrante de cette réflexion.
On aurait donc tort de croire que "le passé appartient au passé" et
que ce qui a été construit avant nous n’est pas porteur de sens. Pour celles et ceux qui connaissent mal Tony Garnier, il est intéressant de rappeler son rôle dans une réflexion plus globale sur le temps et l’espace :
En 1918, il publie l’ouvrage La cité industrielle qui influencera
plusieurs générations de concepteurs dans le monde entier. Il y projette une ville moderne à la morphologie nouvelle, en béton, où tous les équipements collectifs nécessaires à la vie d’une grande agglomération sont mis en place. Il jette ainsi les bases de l’urbanisme
contemporain.
Mais Tony Garnier n’est pas seulement un concepteur, c’est aussi un bâtisseur. Ses principes de La cité industrielle sont testés, expérimentés, avant et après la Première Guerre mondiale, à
Lyon. La production de cet architecte y est presque exclusivement concentrée, encouragée par le maire de l’époque, Édouard Herriot.
Afin de comprendre le contexte dans lequel s'inscrit Tony Garnier, l'exposition nous présente une lettre écrite de la part de celui que l'on surnomme Le Corbusier :
Lettre à Tony Garnier de Le Corbusier, qui vient de découvrir l’ouvrage La cité industrielle, le 14 mai 1919
"Cher Monsieur,
J’ai vu ce matin, pour la première fois, votre ouvrage « LA CITE
INDUSTRIELLE ». Je tiens à vous en dire ma profonde admiration. Il
s’agit d’un jalon délimitant nettement une période passée et ouvrant
tous les espoirs possibles [...]. Votre ouvrage se classe hors de tous
autres semblables par son envergure et par le problème total qu’il s’est
posé. Jusqu’ici les efforts ont été partiels et analytiques ; vous avez
fait de la synthèse et ce qu’il y a de si beau dans ce que vous avez
fait, c’est que vous avez exprimé le premier le véritable esprit de
notre époque. Vous êtes le premier qui ait réalisé l’entente de l’art
avec notre magnifique époque [...]. Dans dix ans, c’est [votre livre]
qui sera la base de toute la production et il aura été le premier signe
de ralliement. [...] Je souhaite que votre livre devienne bientôt
réalité. Vous avez réconforté, par votre travail, ceux qui
commençaient réellement à douter de la possibilité de réaliser un
jour. [...]"
Le Corbusier, source : Babelio.
Halle Tony Garnier, Lyon
Monument aux Morts ( sculpteurs Jean-Baptiste et Auguste Larrivé, Louis Bertola, Claude Grange, 1924-1930), parc de la Tête-d'Or, Lyon
Regard contemporain
Cette exposition met en parallèle les œuvres de Tony Garnier avec la chercheuse Anne-Sophie Clémençon.
Les photographies présentées sont issues du fonds photographique réalisé
par Anne-Sophie Clémençon, historienne des formes urbaines et de l’architecture, chercheure-photographe à l’Université de Lyon. Elle est associée au laboratoire « Environnement Ville Société » (UMR 5600), après avoir été chercheuse au CNRS à l’École normale supérieure de Lyon.
Depuis la fin des années 1970, elle documente les transformations urbaines de l’agglomération lyonnaise et, plus généralement, la culture architecturale et urbaine de nombreuses métropoles, constituant un fonds
de plusieurs milliers d’images argentiques puis numériques.
À l’occasion de la sortie de son livre La ville ordinaire elle explique son point de vue sur le lotissement dans la vidéo Youtube ci-dessous.
On apprend qu'elle a
toujours "associé à son activité de chercheure la photographie, qu’elle
considère comme un langage indispensable pour comprendre et percevoir de
manière sensible l’architecture. Elle défend l’importance de l’image
face au texte tout puissant dans les milieux de la recherche. "
Villa, halle, piscine, stade, les photographies d'Anne-Marie Clémençon dressent un portrait hétéroclite de l’œuvre de Tony Garnier.
Tony Garnier a surtout été actif à Lyon, mais pas exclusivement. Son
œuvre la plus connue en dehors de l’agglomération est l’hôtel de ville
de Boulogne Billancourt, à l’architecture parfaitement maîtrisée, un de
ses derniers chantiers. A Lyon, il a beaucoup construit. Le plus
frappant est la diversité des projets qu’il réalise et leur ampleur. Ce
sont parfois des quartiers entiers, comme les abattoirs de la Mouche,
presqu’entièrement détruits, ou bien le vaste hôpital pavillonnaire de
Grange blanche, appelé aujourd’hui Edouard Herriot, du nom du maire
commanditaire.
Cité des Etats-Unis (1919-1934), Lyon 8e. Photos 2019.
Tony Garnier ( à gauche), Anne-Sophie Clémençon (à droite)
Cette exposition veut favoriser une prise de conscience plus forte de la
valeur de ce patrimoine architectural et urbain, qui pourrait faire la
fierté de la ville à l’image de celui d’Auguste Perret au Havre ou de
Gaudi à Barcelone. Même s’il est partiellement protégé, il s’agit de
lutter contre tout risque d’effacement, urbain comme symbolique.
Cette
exposition propose donc un regard contemporain de l’œuvre bâtie de Tony
Garnier à Lyon. Elle met en valeur à la fois sa beauté et sa fragilité,
ainsi que son actualité du point de vue des propositions architecturales
et urbanistiques.
Exposition virtuelle : Tony Garnier… Et maintenant ?
Une exposition virtuelle complète l'exposition physique à découvrir à la Bibliothèque municipale de la Part-Dieu à Lyon. Elle se compose de quatre partie distinctes :